Covid et châtiment

Beaucoup de théories complotistes circulent autour de l’épidémie du COVID mais bien peu d’entre elles, sinon aucune, ne seront validées par l’histoire. Le virus n’est pas une création humaine sortie par négligence ou volontairement d’un laboratoire ; la crise n’est pas devenue le prétexte pour les puissants d’accélérer la mise en œuvre de leurs projets ; les confinements 2, 3, 4 et couvre-feux n’ont pas été programmés de longue date afin de contrôler et d’étouffer pour des décennies la parole citoyenne ; les gouvernants n’utilisent pas la crise pour imposer des régimes totalitaires en lieu et place des anciennes démocraties… etc, etc. Tout cela est faux bien entendu, les experts de tous ordres nous le prouvent jour après jour et les premiers de classe nous expliquent, preuves à l’appui, combien nous nous trompons en donnant un gramme de croyance à ces hérétiques superstitions.

https://www.strategies.fr/actualites/medias/4043674W/les-10-fake-news-les-plus-repandues-sur-le-covid-19.html

A coup sûr, les scientifiques envoyés en Chine pour enquêter sur l’origine du virus désigneront, pour peu qu’ils en désignassent un, quelque pangolin aux ailes de chauve-souris et aux yeux de castors laineux comme responsable de la fatalité. Quant aux vague de licenciements, faillites des petits commerces, atomisation de la culture, mise sous stress-permanent des populations… elles sont la faute de ce satané virus à couronne mais certainement pas des têtes pareillement chapeautées que nous avons élues. Et ne croyez pas que les confinements sont un moyen facile de faire taire les oppositions, et d’empêcher le débat puisque, chaque fois, les médias se sont relayés avec un remarquable empressement pour promouvoir la juste parole. L’honnêteté de ces médias ne peut, par ailleurs, être mise en doute puisque elle se trouve garantie par les propriétaires des grandes chaînes qui n’ont, comme vous le savez, aucun lien avec ceux qui nous gouvernent, ni ne montrent aucune sympathie avec l’oncle Schawb ! Que dire encore de ces prétendues dérives totalitaires quand toutes les actions mises en œuvre le sont dans le seul but de nous protéger contre le terrorisme viral de ceux qui nous veulent du mal ?

https://fr.weforum.org/platforms

Évidemment les chagrins diront qu’en un an nous avons perdu toutes les avancées sociales dont la prébende avaient nécessité plus d’un siècle de combats syndicaux et politiques, que les 35 heures sont mortes, que les congés sont désormais au bon vouloir des patrons, que le télétravail sept jours sur sept et le temps partiel selon les besoins deviennent non opposables sinon obligatoires et que sous peu on nous demandera de réduire nos salaires par solidarité avec ceux qui massivement perdent les leurs. D’autres nocifs avanceront que l’état d’urgence est devenu permanent avec des prérogatives policières renforcées, que le fichage de la santé des individus est désormais autorisée, annonçant que certains usages ou emplois en dépendront bientôt, que le couvre-feu et le masque s’imposent comme un état de fait pour les temps à venir ou qu’une attestation ou le chargement d’une application de localisation en temps réel est nécessaire pour se déplacer. Les plus sinistres contesteront que la culture nous manque alors que Netflix, Canal Plus et C8 en offrent avec abondance, que les concerts nous manquent alors que la musique peut très bien s’écouter en faisant son jogging sur un tapis roulant entre le lit et la gazinière, que le bistrot du coin nous manque alors qu’on peut tout aussi bien boire une bonne bière en visio-conférence avec ses potes dans un vieux pub irlandais de synthèse, que les magasins de quartier nous manquent alors qu’on vous livre tous vos désirs directement à domicile… etc. Rappelons au besoin que tout groupement de plus de deux personnes est un risque majeur de développer un dangereux cluster de variants tueurs d’innocents. Non, toutes ces affabulation ne sont que fake news, théories du complot et racisme anti-riches. Tout va bien, le gouvernement fait tout ce qu’il peut pour nous sauver la vie, et si certaines de vos relations proches de l’entourage de ceux qui nous gouvernent vous ont annoncé les confinements plusieurs mois à l’avance alors que les décisions n’ont officiellement été prises que quelques jours avant le début de chacun d’eux, ce n’est qu’un hasard, une simple coïncidence ou l’enchantement de quelque suppôt de Satan qui vous tangente l’esprit.

En fait, peu de crime sont commis sans motif. Dès lors, si l’on suspecte une agression, il faut en chercher la raison et, si l’on veut identifier les coupables, regarder dans les faits à qui profitent les bouleversements que cette violence entraîne.

Marée noireQuels sont donc les changements que cette épidémie nous impose ?

1- Un cloisonnement plus important de la population, des individus reliés virtuellement, se déplaçant peu et consommant principalement via des plateformes contrôlées par les multinationales. Une prédominance des dinosaures informatiques par lesquels toute l’information circulera bientôt. Une information évidemment triée pour drainer les consommateurs vers les principales enseignes et soumettre la connaissance à la parole institutionnelle. Un accroissement de la densification urbaine et des contraintes de mobilités, sous couvert d’écologie (ZFE, contrôles techniques, taxes…). Une désertification des campagnes (administration, transports et services de santé absents, normes de constructions individuelles extrêmement coûteuses, PLU et PADD hyper restrictifs…) ou une puissance des communications rendant toute action et production humaine connectable.

2- Une disparition des opérateurs indépendants au profit de grandes chaînes commerciales, de magasins franchisés ou soumis à l’actionnariat. Des restaurants, bars et petites enseignes en faillite bientôt rachetés à bas prix par les grandes chaînes exemptées de confinement. Des artisans laissés sur le carreau bientôt réembauchés, façon Uber, par les grands trusts planétaires largement épargnées par la crise. Des théâtres, libraires, cinémas indépendants ruinés et bientôt « sauvés » par les cadors du secteur à la condition de se soumettre aux désirs des actionnaires qui les financeront. Un système de santé défiguré par la crise, bientôt offert aux fonds vaccinaux illimités des grandes firmes pharmaceutiques.

3- Un amoindrissement des classes moyennes et un creusement du partage des individus en deux entités bien distinctes : les travailleurs et les financiers. Des riches bien décidés à détruire l’électorat éduqué qui valorise encore la démocratie et la solidarité pour ne garder que des individus impulsifs dont l’individualisme aura valeur de liberté. Bientôt, ceux qui détiennent des finances pencheront alors vers les gens de pouvoir en se disant qu’ils en font partie, les autres se partageront en deux camps, les grognons qui trouveront du réconfort dans quelque parti inoffensif de grandes gueules et les moutons à l’américaine, ne votant pas, ne faisant pas de politique, convaincus que leur sort ne dépend que d’eux-mêmes. Pourquoi ensuite maintenir un système électoral que plus personne ne revendiquera ?

4- Une destruction scrupuleuse des acquis sociaux qui se traduira à terme par un revenu minimum universel de survie que viendront compéter les périodes de travail. Bientôt le statut de base pour le travailleur sera celui de l’auto-entrepreneur, intermittent rémunéré sous forme de prestations de service, et, côté employeur, celui de l’entreprise virtuelle de type plateforme, axée sur la mise en relation de l’offre et du besoin avec production à la demande des consommables par des sous-traitants à bas coûts, asiatiques dans un premier temps, africains demain.

5- Une robotisation et une numérisation de la société qui va permettre à ceux qui gèrent les réseaux d’avoir une vision exhaustive des usages, des besoins et des désirs des individus et d’y répondre en un temps minimum. Cela concerne la sécurité en premier lieu où il s’agit d’observer mieux que ne le faisait la Stasi les gestes et les pensées de chaque citoyen afin d’anticiper toute atteinte à l’ordre nouveau. Cela concerne évidement la consommation en rapprochant le plus possible l’achat du désir jusque, là encore, faire que la dépense anticipe la volonté. Cela concerne l’éducation, avec le renversement du rapport enseignant-enseigné, le second devenant client du premier et non plus usager d’un bien commun. La culture et l’information, également, centralisée et diffusée non pas dans le but de servir le citoyen mais de satisfaire l’ambition celui qui les détient. La santé, encore, avec la mise en place de soins obligatoires, du parcage immédiat des brebis galeuses dangereuses pour la nation et d’une incitation à l’euthanasie pour les plus inutiles, résidents des Ephad, des prisons et des hôpitaux psychiatriques.

Le Christe en gilet jaune

Le Covid aura donc en moins de deux ans permit aux plus riches d’entre-nous, actionnaires des multinationales, dirigeants des grandes entreprises et possesseurs de l’essentiel du patrimoine foncier de la planète, curieusement épargnés par la crise économique, d’accélérer grandement la marchandisation du monde en neutralisant tous ceux qui la gênaient encore : exit l’opposition de gauche, les syndicats, les droits de l’homme et autre principe de précaution, exit les petits commerçants et artisans, exit les indépendants, les électrons libres et les libres penseurs, exit l’écologie et l’humanisme… vive le capitalisme du XIXe siècle et sa féodalité bourgeoise ! Ceux qui prétendent qu’on se dirige plus vers les pires sociétés décrites par George Orwell, Aldous Huxley, ou autres Ray Bradbury, se trompent : nous y sommes, en plein, et d’une façon beaucoup plus pragmatique ! Le développement des réseaux, les restrictions sociales consenties et le faux argument du libéralisme ne font qu’amplifier une démarche enclenchée à l’aube des années 90. Le rêve des maîtres de reconstruire le paradis perdu d’une aristocratie toute puissante nourrie par un peuple esclave est en train de se réaliser grâce la providence de cette épidémie opportune et tout à fait bien venue, contre laquelle, de surcroît, aucune opposition politique ne peut rien.

Alors, s’il vous plaît, n’allez plus dire que le gouvernement ne fait rien ! Les centaines de lois, décrets et arrêtés votés lors des confinements témoignent d’une conscience aboutie et d’une volonté tout à fait assumée. Néanmoins, si vous ne faites pas partie des héritiers dont la richesse financière est suffisante pour entrer dans le club restreint des actionnaires, dites-vous que l’histoire a toujours rendu aux enfants des esclaves des armes suffisamment tranchantes pour décapiter ceux qui exploitaient leurs pères. Souffrez en paix mes frères et aiguisez vos lames au fond des caves !

 

Cette entrée a été publiée dans Chroniques, avec comme mot(s)-clef(s) , , , , , . Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien.

Les commentaires sont fermés.